À Salé, une femme agressée et percutée par un véhicule relance l’indignation. L’association ATEC dénonce l’inaction et déploie ses outils pour défendre les femmes dans l’espace public.
La scène circule partout sur les réseaux : une femme agressée en plein jour à Salé et ensuite percutée par un véhicule dont le conducteur n’a même pas daigné s’arrêter. Un énième épisode qui vient rappeler une réalité accablante : l’espace public reste un lieu de danger pour les femmes.
Face à ces violences, certaines associations s’organisent. À Casablanca, l’ATEC (Tahadi pour l’Égalité et la Citoyenneté) agit sur plusieurs fronts. « Ce genre d’agression ne peut plus être considéré comme un fait divers. Nous avons immédiatement pris contact avec des ONG locales pour assurer la prise en charge de la victime», explique Bouchra Abdou, sa Présidente.
Le groupe n’en est pas à son premier combat. Depuis sa création, il milite pour des politiques plus protectrices et une réelle égalité d’accès à l’espace public. L’association dispose à ce titre de deux centres d’écoute, l’un dédié aux violences en général, l’autre à la violence numérique. Elle propose un accompagnement juridique et psychologique aux victimes, tout en menant un travail de fond auprès des jeunes en milieu scolaire et universitaire.
« Nous voulons que les manuels scolaires enseignent les principes des droits humains. L’éducation est un rempart essentiel contre le harcèlement et les violences sexistes », insiste Bouchra Abdou. Pour elle, le problème est systémique. « Nous sommes dans un pays conservateur, mais cela ne doit pas justifier l’impunité. Nos revendications portent sur la démocratie, l’égalité, un État de droit qui protège les femmes, partout. »
La législation actuelle, notamment la loi 103-13 et son article 503-11, reste largement insuffisante. « Elle exige que les femmes prouvent qu’elles ont été harcelées à plusieurs reprises pour que la plainte soit recevable. C’est inacceptable. Ce n’est pas à la victime de se justifier, mais à la police de rassembler les preuves » dénonce-t-elle.
ATEC plaide pour une refonte de cette loi, l’installation de caméras de surveillance dans les espaces publics, et une stratégie nationale cohérente impliquant toutes les institutions. Son engagement se traduit aussi par des campagnes innovantes, comme celle lancée à Derb Ghallef en novembre dernier : « Matharach bia… Wassilat nakl lik ou lia » (Ne me harcèle pas… Un moyen de transport pour toi et pour moi). L’objectif était de sensibiliser 10 000 usagers des transports publics, à travers des badges, des vidéos et des actions sur le terrain. « Nous avons aussi agi en faveur des vendeuses de rue, très exposées au harcèlement. Il était temps que les responsables s’impliquent davantage pour permettre à ces femmes de travailler en sécurité ».
En parallèle des actions de terrain, l’ATEC mène un combat essentiel contre les violences en ligne. Harcèlement, menaces, cyber intimidation… des atteintes souvent sous estimées, mais profondément destructrices. Pour y répondre, l’organisation lance à présent la campagne « Stop violence numérique ». Via l’initiative, elle plaide pour une pleine reconnaissance de ces violences, des lois spécifiques et un accompagnement adapté. Car derrière chaque vidéo virale, il y a une vie brisée et une société entière à responsabiliser…